Par Stive Roméo Makanga
Dans une sortie très remarquée ce mois de novembre, Alain Claude Billie By Nze, dernier Premier ministre d’Ali Bongo Ondimba, s’est imposé comme l’une des principales voix d’opposition à la révision constitutionnelle proposée pour le référendum du 16 novembre imminent. Lors de son échange avec les populations, le rhéteur Alain Claude Billie By Nze a non seulement réaffirmé son engagement en faveur du “Non”, mais a également interpellé la Transition en proposant un débat public télévisé pour permettre aux Gabonais de mieux comprendre les enjeux du scrutin.
Le “chef de l’opposition” au référendum a déclaré vouloir en finir avec ce qu’il qualifie de “monologue de la Transition”. “Ce n’est pas un combat de bâton ni de fusil,” a affirmé Alain Claude Billie By Nze, en relevant l’importance du dialogue et de la confrontation des idées pour une véritable transparence. “Si vous voulez que les Gabonais comprennent ce qui se passe, j’invite à un débat télévisé. Il (Brice Clotaire Oligui Nguema) désigne le représentant du ‘Oui’ et moi, je représente le ‘Non’.”
Dans son discours, Billie By Nze a lancé un défi direct à Brice Clotaire Oligui Nguema, président de la Transition, pour qu’il participe lui-même à cet échange télévisé. À défaut, il a proposé de débattre avec Raymond Ndong Sima, Premier ministre, ou Alexandre Barro Chambrier, Vice-Premier ministre. “Si Barro ne peut pas venir, je ne vois pas qui peut venir”, a-t-il insisté, confortant son scepticisme quant à la capacité de ses adversaires politiques à défendre publiquement le projet de Constitution.
La Transition, menée par le Comité de Transition pour la Restauration des Institutions (CTRI), fait aujourd’hui face à une vague croissante de critiques. Alors que le CTRI, formé après le renversement d’Ali Bongo en août dernier, prétend rétablir l’ordre démocratique, de nombreuses voix s’articulent désormais pour dénoncer un manque de concertation et de dialogue avec les citoyens. Alain Claude Billie By Nze, figure de proue de cette fronde, incarne l’inquiétude partagée par une frange importante de la population, qui craint une dérive autoritaire sous couvert de réformes.
Le projet de Constitution, mis en avant par le CTRI, contient des dispositions qui divisent profondément les Gabonais. Parmi les points les plus polémiques, on retrouve la concentration accrue des pouvoirs exécutifs, une limitation jugée insuffisante des mandats présidentiels, et un encadrement plus strict des libertés publiques. Bien que la Transition assure que ces changements visent à “restaurer les institutions” du pays, la proposition de révision constitutionnelle semble loin de faire l’unanimité, particulièrement auprès de ceux qui, comme Billie By Nze, s’interrogent sur l’impact à long terme de ces mesures.
La proposition d’un débat télévisé pourrait, selon Billie By Nze, constituer une étape décisive dans l’éclaircissement des enjeux du référendum. Ce dernier dénonce en effet ce qu’il perçoit comme une campagne de “propagande” de la Transition, visant à faire approuver un texte sans réelle consultation populaire. “Le peuple gabonais mérite la vérité. Pas des slogans ni des promesses sans fondement,” a-t-il souligné. Pour lui, l’absence de débat public et de mise en concurrence des idées trahit une volonté de faire passer cette révision constitutionnelle en force.
Avec son appel au débat, l’ancien patron de la primature cherche ainsi à bousculer l’ordre établi et à exposer ce qu’il considère comme les failles du projet de constitution. Son initiative résonne chez de nombreux Gabonais qui, malgré les assurances du CTRI, peinent à trouver des réponses à leurs préoccupations.
En s’exprimant de manière aussi directe et en défiant ouvertement les plus hautes autorités de la Transition, Alain Claude Billie By Nze réunit autour de lui une coalition de mécontents et de sceptiques. Alors que la campagne officielle du “Oui” bat son plein, le “Non” s’organise et prend peu à peu la forme d’un véritable mouvement de contestation.
Le refus de la Transition de répondre à cet appel au débat pourrait d’ailleurs s’avérer un faux pas stratégique, qui renforcerait l’idée d’une démarche fébrile et pas très rassurante. Pour les partisans du “Non”, le refus de dialoguer serait le signe d’une volonté de faire passer le projet en force, sans respecter l’esprit démocratique que la Transition prétend défendre.