Sous peu, Ali Bongo Ondimba procédera, sur proposition de Rose Christiane Ossouka Raponda, à la formation d’un tout nouveau gouvernement. Une équipe qu’il faudra considérer comme la cheville ouvrière de la mise en œuvre des projections du Parti Démocratique Gabonais (PDG) pour la présidentielle de 2023. Pour être à la fois décisives et pertinentes, les nominations devront s’appuyer sur des substrats non rédhibitoires.
Les grandes décisions changent tout. C’est d’ailleurs précisément la raison pour laquelle il faut en faire.
En son temps, Omar Bongo Ondimba avait cette admirable perspicacité: celle de décrypter les trajectoires des évènements dans le microcosme politique gabonais et d’en anticiper les effets dommageables.
En procédant par exemple à la nomination au gouvernement de Nzengué Mayila avec l’idée de mettre en déroute la progression de l’UGDD de Zacharie Myboto dans le sud de la Ngounié, il avait résolu une équation d’une complexité inouïe.
Cette clairvoyance avait eu le mérite de rebattre les cartes, corriger un déséquilibre qui aurait pu être la source d’une bérézina du PDG, parti au pouvoir.
Pour la présidentielle imminente, la même problématique se pose, cette fois-ci avec une intensité encore plus vive.
Les soubresauts du PDG dans cette partie du pays pourraient être tragiques en 2023. Le déséquilibre des nominations dans cette zone tampon conforte l’hégémonie de l’opposition, menée par d’anciens apparatchiks du régime demeurés opulents et politiquement corrosifs.
D’abord, il est judicieux de rappeler que la Ngounié ce sont neuf départements : Tsamba Magotsi (Fougamou), Ogoulou (Mimongo), Louetsi Wano (Lebamba), Dola (Ndendé), Louetsi Bibaka (Malinga), Mougalaba (Guietsou), Boumi Louetsi (Mbigou), Ndolou (Mandji) et Douya-Onoye (Mouila), subdivisés en deux grands hémisphères portant les désignations de Ngounié Nord et de Ngounié Sud.
Ensuite, il faut d’entrée de jeu faire la précision que la Ngounié Nord enregistre deux membres du gouvernement: Léon Armel Bounda Balonzi et Yolande Nyonda, tous deux originaires de Tsamba Magotsi.
Outre ces derniers, ce seul département compte aussi Lucie Milebou Aubusson épouse Mboutsou, la présidente du Sénat.
Puis, un directeur de la Caistab et bien d’autres hauts cadres fortunés.
Dans la Ngounié centre, il y a Biendi Maganga Moussavou, le ministre de l’Agriculture.
Paradoxalement et, les raisons d’un tel contraste demeurent inconnues, la Ngounié Sud pointe “zéro” au gouvernement.
Même cas de figure dans les administrations publiques d’autorité.
Une observation lucide du développement de cette contrée permet d’établir le constat que depuis l’éviction de Machima, un ministrons dont la présence au gouvernement n’aura duré que deux petites années, la Ngounié Sud a été privée d’un représentant dans toutes les équipes gouvernementales qui se sont succédées.
Pas même un haut fonctionnaire de l’administration, à l’exception d’un originaire de la Boumi Louetsi, qui n’aura passé que quelques jours en poste au Budget.
Si le PDG peine à correctement déployer ses porte-voix dans les deux grands hémisphères précités, l’Opposition en revanche s’organise.
Preuve en est des législatives de 2018. Moulengui Mabendé, un ancien questeur et Philippe Nzengué Mayila, un ancien ministre, tous deux transfuges du PDG et par ailleurs très fortunés, ont remporté les suffrages pour le compte de l’opposition.
Confortablement établis dans leurs sièges respectifs, au fait des préoccupations de leur électorat, ces deux leaders ont aujourd’hui toutes les ressources adéquates, lesquelles leur permettent de faire ombrage au PDG et à Ali Bongo Ondimba dans toute la zone Sud durant le scrutin de 2023.
Ces seuls faits devraient inciter les instances décisionnelles du parti au pouvoir à faire preuve de la plus grande lucidité.
Pour corroborer le schéma d’Omar Bongo Ondimba, d’autres cadres (les nouveaux arrivants au PDG y compris) devraient-ils faire l’objet de nominations dans le tout prochain gouvernement? La question vaut son pesant d’or.
De plus, comme facteur positif, il faut rappeler que nonobstant son faible niveau de développement, tout le contraire de son hémisphère opposé qui lui dispose d’entreprises de références comme Shell, Assala et CBG, en plus des infrastructures de base, le Sud a fortement plébiscité Ali Bongo Ondimba, alors qu’à Fougamou et à Mandji, dans le Nord, il se tenait aux coude à coude avec Jean Ping.
Il est presque certain, en considérant les évidences relevées, qu’un rééquilibrage des nominations dans cette partie du pays contribuerait à plus d’un égard à la reprise d’une zone stratégique gracieusement offerte à l’opposition.
Sous Omar Bongo Ondimba, de fortes figures du PDG tels Jean Rémi Pendi Bouyiki (17 ans au gouvernement), Christiane Leckat et Dieudonné Nzengué en avaient la pleine maîtrise.
Peut être un sursaut, même si tardif.
Par Stive Roméo Makanga