Édito. Les auditions de Ike Ngouoni et Christian Patrichi Tanasa, respectivement anciens porte-parole de la présidence de la République et administrateur directeur général de la GOC, ont le mérite d’avoir fait le point sur l’opération dite “Scorpion”, initiée en trombe en 2019. Brice Laccruche Alihanga (BLA) y apparaît comme l’élément dont il faut à tout prix acter la condamnation.
Par Stive Roméo Makanga
L’opération anti-corruption “Scorpion”, à l’inverse d’avoir convaincu l’opinion de la culpabilité de Brice Laccruche Alihanga (BLA) et de tous ses proches, s’est heurtée de plein fouet à un revers circonstanciel qui en dit long sur la sincérité de cette action judiciaire lancée sous fond de tapage médiatique.
À la barre, tour à tour, Christian Patrichi Tanasa Mbadinga et Ike Ngouoni ont révélé toutes les exactions et les intimidations dont ils ont été les objets.
D’abord à la Direction générale de recherche (DGR), institution aujourd’hui dirigée par le Colonel Jean Norbert Madjoupa, qui se serait rendue coupable, si l’on en croit Ike Ngouoni, de falsification de procès verbal à l’effet d’incriminer Brice Laccruche Alihanga (BLA). Ces documents, qui auraient dû être sans équivoques, ont été boudés par l’ancien porte-parole de la présidence de la République. «J’ai été humilié, torturé et intimidé pour incriminer Brice Laccruche Alihanga», a-t-il lancé devant la Cour criminelle spéciale. Et: “À la DGR, j’ai été humilié, déshabillé et laissé torse nu, en slip près de 48 heures dans une salle appelée le mitard”.
Des aveux troublants, qui donnent matière à réflexion sur le respect des droits de l’homme, sachant que le Gabon est membre du Conseil des droits de l’homme (CDH), de l’organisation des Nations-Unies d’une part, et que dans le préambule de la loi fondamentale, mention spéciale en est expressément faite, d’autre part.
Puis à la prison centrale de Libreville, où l’ancien directeur de Cabinet d’Ali Bongo Ondimba et ses proches sont détenus, depuis le début de ce qui apparaît désormais aux gabonais comme un gros simulacre judiciaire.
Christian Patrichi Tanasa et Ike Ngouoni ont été on ne peut plus formels. Injonctions leur ont été faites de dénoncer BLA, en contrepartie d’un allègement de peine, on imagine bien. Une thèse qui se vérifie par le fait que certains proches collaborateurs de Brice Laccruche Alihanga, qui ont cédé, ont bénéficié de non-lieux, et ont été libérés en catimini entre 2020 et 2021.
« Au terme d’une année d’enquête, les magistrats n’ont que très peu d’éléments concrets sur l’enrichissement illicite de Brice Laccruche et n’ont pu lancer aucune commission rogatoire (…).
Pire : certains fonctionnaires des trois services enquêteurs auraient commis des écarts dans des actes du dossier.
Une partie des valeurs saisies lors de perquisitions aurait ainsi disparu.
Une enquête interne aux 3 services a été ouverte et plusieurs fonctionnaires mis à pied.
(…) Depuis plusieurs semaines, le parquet et la police gabonaise s’emploient à évaluer l’ampleur des dégâts que les manquements pourraient avoir occasionné sur le dossier, afin que l’enquête très largement médiatisée ne s’effondre à la barre », indiquait alors Africa Intelligence, dans sa livraison du mercredi 7 octobre 2020.
Il apparaît, à coups sûr, que les accusateurs de BLA ont été en grande difficulté et que, souhaitant rendre le dossier plus solide, rien de mieux que des révélations de ses coaccusés.
Mais malgré toutes les contrariétés qui leur ont été opposées, l’ex ADG de la GOC et l’ancien patron de la Communication présidentielle ont tenu à garder leurs dignités.
L’écho médiatique qui a découlé des deux derniers procès a renforcé les doutes, et confirmé la thèse d’un acharnement politique.
Les “médias” pilotés par la Direction de la Communication présidentielle actuelle, pompeusement estampillés presse, ont beau vouloir noyer la vérité sortie des audiences et parfaitement retranscrite par S.O.S prisonniers, l’opinion nationale et internationale retiennent, avec un peu plus de recul et plus d’objectivité, toute la compromission, en matière de détournement de deniers publics, dont la présidence de la République et la famille du chef de l’État, nommément citée, se sont si bien rendus coupables.
Et si Brice Laccruche Alihanga y est impliqué, dans une moindre mesure, il ne saurait, lui et ses anciens collaborateurs, en porter toute la responsabilité.
Les audiences successives des “ajeviens” apparaissent désormais comme de pâles parodies, assez mal interprétées, et qui, peu à peu créent des émules.
Brice Laccruche Alihanga (BLA): l’homme à abattre?
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