Par Joseph Mundruma
La branche gabonaise d’Airtel Africa, une filiale du géant indien des télécommunications Baahrti, est actuellement en proie à des turbulences judiciaires. Un procès-verbal de saisie d’actifs a été émis à l’encontre de ce dernier, en raison de son non-respect d’un contrat avec une PME gabonaise, 2jth-Gabon, pour lequel elle a été condamnée par les tribunaux nationaux et la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) à une amende substantielle.
En effet, il faut dire que cette amende, qui s’élève désormais à plus de 55 milliards de francs CFA, inclut le principal, les intérêts et les frais, en violation de l’article 15, paragraphe 7, du contrat rédigé par l’entreprise elle-même.
Cette sanction financière est le dernier rebondissement d’un conflit décennal qui met en lumière les défis du recouvrement de créances dans des contextes juridiques complexes et l’importance de l’exécution des contrats de bonne foi. Le litige a débuté en 2014 lorsque 2jth-Gabon a été engagée par Airtel Gabon SA pour fournir des services de régularisation administrative sur plusieurs sites de télécommunications à Libreville et ailleurs, dont 279 sites sont au cœur du litige actuel. Malgré la conformité de 2jth Gabon Sarl aux termes du contrat, Airtel Gabon SA a contesté le montant facturé et refusé de payer intégralement, déclenchant ainsi une clause contractuelle qui a donné lieu à une série de procès favorables à la PME gabonaise.
Bien que les tribunaux, y compris la CCJA, aient rendu plusieurs décisions en faveur de 2JTH depuis 2019, confirmant le droit de l’entreprise à des paiements importants pour ses services, Airtel n’a jamais réglé ces condamnations, accumulant ainsi des intérêts pour retard de paiement. Le 2 avril 2024, le conflit a pris une nouvelle tournure avec la saisie des actions, des actifs mobiliers et d’autres titres détenus par Airtel Gabon SA au sein de sa filiale lucrative Airtel Money SA. Cette action vise à recouvrer le montant total dû, y compris le principal, les intérêts légaux et les frais, démontrant une volonté ferme de faire respecter les décisions de justice.
Cette situation survient dans un contexte de discussions récentes entre le fondateur d’Airtel, Sunil Bharti Mittal, et le Président du Gabon, le Général de Brigade Brice Clotaire Oligui Nguema, concernant des investissements stratégiques. Bien que ces discussions aient principalement porté sur le développement numérique futur du Gabon, elles coïncident avec une période de forte pression judiciaire sur la multinationale.
Pour mieux comprendre ce cas, nos confrères de Conjonctures économiques ont tenté, en vain, de contacter la direction d’Airtel. Néanmoins, cette situation souligne les défis de la gouvernance des entreprises internationales en Afrique et l’importance cruciale du système judiciaire gabonais pour maintenir l’équilibre contractuel et commercial. Elle met également en lumière le rôle essentiel des institutions judiciaires dans la préservation de l’équité et de la légalité dans les affaires commerciales et dans l’exécution des décisions judiciaires, affirmant leur capacité à imposer le respect des contrats à toutes les entités, quelle que soit leur taille ou leur influence.
Pour information, Airtel est présente au Gabon depuis 14 ans et rivalise sur le marché national avec Moov Africa Gabon Telecom, l’opérateur historique des télécommunications au Gabon, ainsi qu’avec Canal Box dans le segment internet.