Difficile de répondre à cette interrogation, si l’on considère les très nombreuses défections enregistrées au sein de la classe politique de l’opposition depuis la “défaite” de Jean Ping à la présidentielle de 2016.
Affaiblis, tous les acteurs politiques opposés aux magistères d’Ali Bongo Ondimba manquent de jus pour poursuivre la bataille, y compris Jean Ping lui même, dont l’écho de la voix se fait de moins en moins entendre dans le pays.
Pis, les figures de proue de la Coalition pour la nouvelle république n’hésitent plus désormais à retourner au Parti démocratique gabonais (PDG au pouvoir), formation politique qu’ils avaient jadis vomi. C’est le cas pour René Ndemezo’o Obiang et Frédéric Massavala Maboumba, il y a peu.
Même si l’on se contentait de ces deux exemples, l’opinion a parfaitement compris qu’au Gabon, la politique est d’abord et avant tout une affaire d’intérêts.
Et il faut dire qu’à l’orée de la présidentielle de 2023, les choses se bousculent.
Période charnière, personne ne souhaiterait être mis à l’écart, surtout des sphères où les choses se décident, l’argent, la carrière politique et la position sociale constituant les enjeux les plus significatifs.
Au sein de l’opposition, toute la question est portée sur la crédibilité et la représentativité.
Jean Ping et Zacharie Myboto mis à part, en raison de leur âge, qui pour porter la voix de l’opposition à la présidentielle imminente ? Personne. A priori.
Paulette Missanbo et Vincent Gondjout de l’Union nationale (UN) n’ont jamais été de vrais leaders à ce niveau de la politique.
Casimir Marie Ange Oye Mba lui, est connu pour être très imprévisible. Le retrait de sa candidature à la dernière minute lors de la présidentielle de 2009 est toujours vif dans la mémoire des gabonais.
Jean Éyéghé Ndong, le leader de tout le deuxième arrondissement de Libreville, pour l’instant très attaché à ses valeurs et, même si très apprécié dans l’opinion, aura grand peine à être un leader de premier plan. Za nfe est plutôt connu pour être un conseiller politique très stratégique.
Gérard Ella Nguema et Bruno Ben Moubamba sont trop fous, impulsifs et disproportionnés.
Richard Moulomba, d’une intégrité surprenante, est sage à l’excès, exagérément réservé, poli et courtois, pour prétendre briguer la présidentielle prochaine et se faire élire face à des adversaires sans foi ni morale.
Jean François Ntoutoume Émane est trop vieux et pédant. De plus, il manquerait d’énergie s’il se bornait à se mettre lui aussi en course pour la présidentielle.
D’ailleurs, l’on se souvient encore de son discours, qu’il tenait dans sa résidence, annonçant sa sortie du PDG et la création de sa propre formation politique. L’ancien premier ministre d’Omar Bongo s’était alors écroulé devant les caméras, sur le pupitre, à la stupeur générale.
Comment oublier Pierre Claver Maganga Moussavou, trop agité pour être un candidat sérieux face à Ali Bongo Ondimba. De plus, l’affaire Kevazingo l’aura profondément entaché. L’empreinte, indélébile, est encore bien perceptible dans l’opinion. Et si depuis les années 90 il n’a jamais réussi à convaincre les gabonais, ce n’est certainement pas en 2023 qu’il y arrivera.
Bien qu’il ne soit pas un opposant au sens premier du terme, Dieudonné Minlama Mintogo a désormais toute sa place dans le micrososme politique gabonais. Seul bémol, l’homme est peu connu des populations.
Si ses propositions en matière de gestion de la chose publique ont la particularité de retenir l’attention, tout le problème peut résider dans sa popularité à travers le Gabon, qu’il doit encore séduire.
Mais il y a désormais Alexandre Barro Chambrier, dit ABC, le cassoulet. Cohérent dans son discours politique, au firmament de sa notoriété, le leader du RPM est celui qui pourrait compliquer l’équation à Ali Bongo Ondimba.
Connu pour sa verve, incisive et acerbe, le rejeton du Dr Eloi Chambrier est sans conteste, le leader politique qui retient de plus en plus l’attention de l’opinion. Sa jeunesse, son énergie et son discours politique le placent systématiquement en pôle position.
L’opposition accuse, au vu de ce qui précède, un profond déficit d’hommes et de femmes capables de la représenter à une échéance présidentielle.
Dans les rangs de la majorité, même s’ils le disent à demi-mots, le candidat est connu: Ali Bongo Ondimba, même si gravement diminué dans sa mobilité et sa verve, ira au front, probablement avec des messagers “intimes”.
L’évidence de preuves devrait pouvoir nous convaincre. Ali Bongo ne tiendrait pas un troisième mandat. Il remportera probablement le scrutin, mais ne tiendra pas un septennat.
Stive Roméo Makanga