Par Stive Roméo Makanga
C’est dans une atmosphère solennelle que le Ministre du Travail et de la Lutte contre le Chômage, Adrien Nguema Mba, s’est adressé aux partenaires sociaux, représentants des organisations syndicales gabonaises, à l’occasion d’une rencontre d’envergure tenue à la Mairie centrale de Libreville et au Pôle National de Promotion de l’Emploi (PNPE), jeudi 26 septembre courant.
Pour sûr, cet événement marque un jalon majeur dans la structuration du dialogue social au Gabon, avec l’annonce officielle de la tenue imminente des premières élections professionnelles. Un processus attendu depuis longtemps, aussi bien par les syndicats que par l’Organisation internationale du travail (OIT).
Dans son laïus, le Ministre Adrien Nguema Mba a relevé que ces élections professionnelles répondent à une double exigence : la régularisation de la représentativité syndicale et la mise en conformité avec les normes internationales. Ces élections visent donc à remédier à la fragmentation du paysage syndical national, jugée préjudiciable à l’unité des travailleurs et à leur capacité d’influence face aux employeurs et aux autorités publiques.
Le membre du gouvernement a tenu à rappeler que les syndicats gabonais se répartissent en trois niveaux de représentativité, conformément à l’article 316 du Code du Travail de la République Gabonaise (Loi n°022/2021) : les syndicats de base, les fédérations syndicales et les confédérations syndicales. Chaque niveau doit atteindre des seuils spécifiques d’effectifs pour pouvoir être représenté. Ainsi, les syndicats de base doivent réunir 25 % des travailleurs de l’entreprise, les fédérations doivent représenter 30 % des effectifs de leurs branches, et les confédérations, 40 % des fédérations nationales. Ces critères, dictés par la loi, garantissent une représentation équitable des intérêts des travailleurs au sein des instances de négociation collective.
Il faut dire que la mise en place de ces élections s’inscrit dans une volonté de renforcement du dialogue social et d’amélioration des conditions de travail. Le membre du gouvernement a insisté sur le fait que ce processus démocratique permettrait aux travailleurs de choisir librement leurs représentants, dotés d’une légitimité incontestable. Ces derniers auront pour mission de négocier de nouvelles conventions collectives, tenant compte des réalités contemporaines du marché du travail, et de défendre les droits des travailleurs dans un contexte en constante évolution.
Adrien Nguema Mba a également précisé que l’initiative de ces élections ne découle pas d’une imposition politique, mais répond à un constat objectif fait par l’OIT, d’une part; et par les autorités gabonaises, d’autres part. Le mouvement syndical, trop longtemps éparpillé et sujet à des rivalités internes, doit se restructurer pour mieux servir les intérêts des travailleurs. Le Ministre du Travail a évoqué des problèmes récurrents, tels que l’absence de renouvellement des instances dirigeantes des syndicats, et la non-révision des conventions collectives, certaines datant de plus de 40 ans.
“Ces élections sont une excellente chose à plusieurs niveaux. Au niveau de la gestion de nos organisations professionnelles, de la prévention des conflits sociaux, et aussi de l’essor de notre économie. Quand on parle de facteurs de production, l’homme occupe une position centrale. Mais pour que cet homme donne le meilleur de lui-même, son environnement doit être assaini. Et il n’est pas assaini par décret, mais par un certain nombre d’instruments qui sont mis en place. Le summum de ces instruments passe par les élections professionnelles “ a déclaré Marcel Mintsa Mi Essono, président de la Confédération Gabonaise des Petites et Moyennes Entreprises (CGPME).
Ce processus électoral s’inscrit également dans le cadre de la refondation institutionnelle amorcée par les autorités de la Transition, après le coup de libération du 30 août 2023, qui a porté à la tête de l’État le Général de Brigade Brice Clotaire Oligui Nguema. Le Ministre a affirmé que les plus hautes autorités de la Transition, avec à leur tête le Président de la République, œuvrent activement pour restaurer toutes les institutions du pays, y compris les syndicats, considérés comme des piliers de la démocratie sociale.
Les élections professionnelles, qui concerneront aussi bien le secteur public que privé, constituent une étape cruciale dans cette démarche de restauration. Elles ne visent ni à favoriser un syndicat particulier, ni à marginaliser un autre, mais à consolider les bases d’une représentation syndicale légitime et à instaurer un cadre de coopération entre les partenaires sociaux.
C’est dans ce contexte qu’Adrien Nguema Mba a dressé une liste des avantages que ces élections apporteront aux travailleurs gabonais. Elles permettront, en premier lieu, d’accroître la représentativité des syndicats, en reflétant la diversité des voix et des intérêts au sein du monde du travail. En second lieu, elles renforceront la légitimité des représentants élus, posant de facto les bases d’un dialogue constructif avec les employeurs et les autorités. Enfin, une fois les élections terminées, la révision des conventions collectives sera facilitée. Ce qui devrait permettre l’ouverture de la voie à la mise en place du Conseil National du Dialogue Social, une revendication des syndicats depuis la trêve sociale de 2003.
Le Ministre du Travail a également exhorté les syndicats à s’impliquer pleinement dans ce processus électoral, et a insisté sur la nécessité d’une participation large et active. Cette implication, selon lui, est essentielle pour garantir la crédibilité des élections et la reconnaissance des résultats par tous les acteurs du monde du travail. Une forte mobilisation permettra de renforcer le poids des syndicats dans les négociations avec les employeurs et les autorités publiques.
Pour plus de concision, Adrien Nguema Mba a réaffirmé l’engagement du Président de la Transition, du Gouvernement et de l’OIT à accompagner ce processus démocratique. Les élections professionnelles offrent une opportunité historique de redynamiser le mouvement syndical et de garantir une meilleure représentation des travailleurs dans les instances de décision. À l’issue de cette initiative, le Gabon espère consolider sa démocratie sociale et offrir aux travailleurs un cadre de négociation plus juste et plus équitable. Le rendez-vous est donc pris pour un tournant décisif dans l’histoire du syndicalisme gabonais.