Par Stive Roméo Makanga
Très attendu des populations, au plus fort des soubresauts sociopolitiques et des mesures gouvernementales volontairement coercitives, le discours à la nation du chef de l’État, prononcé ce 31 décembre 2021, a convaincu plus d’un de l’absence d’humanisme du numéro un gabonais, et de cette absolue nécessité de tourner au plus vite la page “Ali Bongo Ondimba”.
L’allocution du successeur d’Omar Bongo Ondimba a ce mérite d’avoir été clair, et donc dépouillé d’allusions complexes. Nonobstant les soubresauts agoniques qui ont émaillé l’actualité ces dernières semaines, les déconvenues du gouvernement face à une société civile décidée à faire entendre les aspirations du peuple sur les questions inhérentes aux libertés fondamentales, les deux chambres du parlement ayant perdu (en quelque sorte) cette prérogative, le chef de l’État a fait le choix de l’obstination.
Une posture malheureuse, laquelle a (et c’était prévisible) conduit au désaveu le plus farouche.
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En Tunisie, le déclin du régime Ben Ali avait commencé par suite d’un entêtement incompréhensible de l’Exécutif, qui se bornait à penser qu’il agissait pour le bien des populations, se refusant d’écouter et ou d’accéder aux justes revendications opposées. C’est exactement ce que fait Ali Bongo Ondimba et son gouvernement, convaincus par on ne sait quel manitou de la justesse de leurs décisions.
Les signes du déclin sont pourtant perceptibles : le pays a atteint un niveau d’endettement historique, avec 7000 milliards de dette (du jamais vu depuis Léon Mba).
La gestion de la crise pandémique est un désastre. Le gouvernement, à genou, n’arrête plus de jouer les péripatéticienne, de mendier littéralement des lignes de crédits auprès du FMI et des autres institutions financières à l’international.
Le marasme pue à plein nez, et prive depuis deux années consécutives déjà, des milliers de jeunes à travers le pays, d’emplois décents.
Le secteur informel, qui joue un rôle décisif dans notre économie a été littéralement plombé par des mesures anticovid scandaleuses que plus un seul pays de la sous région n’observe, à l’exception du Gabon.
La colère des populations est donc à ce titre justifiée. Le président gabonais et son gouvernement se complaisent dans un mimétisme presqu’irrationnel de la France, dont la réalité de la propagation du virus se tient à des années lumières de la nôtre.
L’axiome est tout simple : comme pour Ben Ali, lorsqu’un président s’obstine à penser qu’il agit dans la perspective dz l’intérêt général, au mépris des voix dissidentes, il est tout évident qu’il ne répond plus aux aspirations du plus grand nombre.
Le retrait de la gestion de la chose publique apparaît dès lors comme une juste conséquence, à défaut d’un printemps, souvent seul recours possible pour l’aboutissement d’un projet global d’alternance.
Les tunisiens ont osé, admirablement. Et si les intimidations de l’armée n’ont pas pu éteindre les passions, il faut croire qu’il est tout aussi possible que le schéma soit reproduit ici, à l’identique.