Liberté, dignité, lucidité : Joseph S. Perrin Ntoutoum Émane appelle à un « nouvel élan du contrat social »
Par Joseph Moundruma
Dans une tribune dense et explicite intitulée « Liberté, Dignité, Lucidité : pour un nouvel élan du contrat social sous la Vᵉ République », dont notre Rédaction a obtenu copie, Joseph S. Perrin Ntoutoum Émane livre une réflexion profonde sur les défis de la transition politique et morale du pays. Entre appel à la responsabilité citoyenne et exigence de cohérence gouvernementale, l’auteur invite à « redonner sens à la Vᵉ République » par une refondation du contrat social fondée sur la liberté, la dignité et la lucidité.
Un Gabon à la croisée des chemins
Dès les premières lignes, le ton est donné. Le Gabon, écrit-il, traverse « une de ces heures charnières où les peuples oscillent entre l’espérance d’un renouveau et la fatigue des promesses inachevées ». Cette métaphore, à la fois lucide et mélancolique, illustre le sentiment d’attente qui parcourt la société depuis le « coup de la libération » du 30 août 2023.
Joseph S. Perrin Ntoutoum Émane invite à un examen intérieur collectif : « Le regard que nous portons sur notre nation n’est jamais neutre ; il agit sur elle, il la transforme ». L’observation citoyenne, affirme-t-il, devient donc un acte politique en soi, un principe qu’il emprunte à la mécanique quantique d’Heisenberg pour en faire un concept civique.
La liberté, conquête et non héritage
Pour l’auteur, la liberté ne saurait se réduire à un slogan ou à un héritage historique. Elle est un effort permanent, un combat contre la résignation. « La liberté n’est pas un don, mais une conquête », écrit-il, rappelant que toute démocratie exige un peuple éclairé.
L’intellectuel déplore la superficialité du débat public à l’ère des réseaux sociaux, où « l’on commente sans comprendre, on juge sans lire, on réagit sans savoir ». Il en appelle à une réhabilitation du savoir et de la lecture, seuls garants d’une liberté véritablement consciente et responsable.
La dignité, socle de la République
Revenant sur la promesse du régime de transition de « rendre au Gabonais sa dignité », Joseph S. Perrin Ntoutoum Émane avertit : « La dignité ne se décrète pas : elle se vit, elle s’éprouve, elle se prouve ».
Pour lui, cette dignité repose sur des institutions fortes et équilibrées, à l’image du principe de Montesquieu selon lequel « le pouvoir doit arrêter le pouvoir ». Il met en garde contre une Assemblée nationale « à une seule coloration », qui risquerait d’étouffer la diversité d’opinion indispensable à la vitalité démocratique.
« Ce qui paraît être une force pour le pouvoir peut devenir, à terme, une faiblesse pour la République », écrit-il, soulignant la nécessité du pluralisme comme respiration politique.
La Vᵉ République à réinventer
Alors que la Vᵉ République gabonaise est souvent invoquée comme le symbole d’un renouveau institutionnel, Joseph Ntoutoum Émane en dénonce la dérive sémantique : « On la cite, on la proclame, parfois comme un slogan plus que comme un engagement. »
Selon lui, la promesse de refondation reste inachevée. Le peuple attend encore les fruits concrets de cette « dignité retrouvée » et de cette « transparence proclamée ». L’auteur appelle à reconstruire la confiance entre gouvernés et gouvernants à travers un véritable contrat social fondé sur l’écoute, la justice et la vérité de l’action publique.
Lucidité, conscience et espoir
Au-delà de la critique, Ntoutoum Émane plaide pour une lucidité constructive, capable de « reconnaître ce qui a été accompli tout en maintenant l’exigence de vigilance ».
Cette lucidité, explique-t-il, n’est pas seulement critique : elle doit être prospective, « savoir mesurer le temps de la promesse, de l’action et de l’administration ». Elle appelle à une société mature, capable d’évaluer l’action publique sans excès ni complaisance.
Enfin, l’auteur conclut sur une note d’espérance, citant Rebecca Solnit : « L’espoir n’est pas une illusion naïve, mais la conviction que nos actes peuvent encore infléchir le cours de l’avenir. »
Un plaidoyer pour la responsabilité collective
En définitive, la tribune de Joseph S. Perrin Ntoutoum Émane s’impose comme une méditation politique sur la condition gabonaise contemporaine. À travers les trois vertus cardinales (Liberté, dignité, lucidité), il invite gouvernants et citoyens à dépasser la posture de spectateurs pour redevenir acteurs d’un destin commun.
« Une République ne se maintient que par le double souffle de la responsabilité et de l’espérance », écrit-il en conclusion, avant de lancer ce vœu : que la Vᵉ République devienne enfin « celle d’un peuple debout, libre et digne, maître de son destin ».



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