Par Stive Roméo Makanga
Cette question devrait être au centre de la campagne présidentielle gabonaise que l’on sait imminente, et la raison en est toute plausible.
Alors que de nombreux pays sur le continent affichent des performances économiques incroyables et que se consolident leurs croissances, toutes acquises au prix de la qualité des réformes engagées sur des décennies, le Gabon est quant à lui resté extraordinairement statique.
À dire vrai, si tant est que nous devrions être rigoureux dans l’usage d’expressions pour désigner notre actuel état, nous devrions plutôt dire que nous avons sombré comme jamais, et que toute possibilité de regain devrait désormais être envisagée sur le long terme.
Toutes dénégations balayées d’un revers de main, le Gabon a entamé sa courbe descendante dès le premier magistère d’Ali Bongo Ondimba (2009-2016).
L’illusion monétaire lui a d’abord donné un sentiment d’hyperpuissance, puis, l’a fait s’abandonner à tous les excès, et le laxisme budgétaire qui en a découlé a fini de sceller le sort du pays.
De fait, son deuxième septennat, 2016-2023, pourrait être à juste titre considéré comme celui du surendettement. L’administration d’Ali Bongo Ondimba a multiplié les emprunts obligataires et jamais dans notre histoire, nous n’avions autant sollicité les institutions financières à l’international.
Le plongeon du président de la République dans l’irrationnel est désormais historique.
Son ambition première, celle de faire du Gabon un pays émergent à l’horizon 2025 n’a été qu’une chimère, tout comme celle de construire 5000 logements par an, soit 70.000 en 14 ans.
Et des projets amorcés puis abandonnés en cours de route sans que l’on ait vu une once de résultat se comptent à la pelle.
À demi-mots, lors de ses traditionnelles allocutions devenues si éphémères, le chef de l’État a pleinement assumé ces renoncements à répétition.
L’émergence annoncée n’a été qu’un argument de séduction, qui au demeurant a bien fonctionné; et le plan d’accélération et de transformation (PAT) qui en a découlé renferme lui-même tous les gènes de cet échec.
Si pour avoir échoué sur des thématiques comme la hausse du chômage, le climat économique ou les mesures de rigueur, Nicolas Sarkozy avait dû prendre une claque électorale, même si assumée dignement, lors de la primaire de son camp, ce n’est pas à Ali Bongo Ondimba que l’on ne fera pas le reproche d’avoir échoué sur toute la ligne et de le lui faire savoir par la voie des urnes, comme à l’ancien patron de l’UMP, nouveau LR.
D’ailleurs, la mauvaise gestion de la crise pandémique est sans conteste, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, et qui pourrait, conséquemment, justifier le vote des populations, si tant est qu’il est considéré. Mais c’est un tout autre débat.
En deux septennats, Ali Bongo Ondimba a saturé le terrain médiatique et politique avec des annonces. Cela va de la construction de nouvelles universités et d’un aéroport, ou du don de son héritage personnel au profit de la jeunesse. Tout y est passé.
S’il souhaitait briguer un 3e mandat en s’appuyant sur ses faibles réalisations, presqu’invisibles d’ailleurs, il devra considérer l’observation de Nicolas Sarkozy à son équipe de campagne lors de la primaire de son camp: “On ne gagne pas sur un bilan et les français qui votent Front national veulent un autre discours”.
14 ans de reculades, de castings hasardeux et de nominations complaisantes au sommet de l’État se paient cher et toute sollicitation de suffrages pour un énième mandat apparaît désormais comme indécente.