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Transition/sept milliards par province, zéro traçabilité: la CNLCEI part à la chasse à l’argent public

Par Stive Roméo Makanga

Il est des chiffres qui claquent comme une promesse politique et d’autres qui, avec le temps, prennent des allures d’énigme comptable. Les sept milliards de francs CFA alloués à chaque province durant la période de la Transition appartiennent désormais à la seconde catégorie. Annoncés comme le carburant d’un développement communautaire de proximité, ces fonds font aujourd’hui l’objet d’un examen minutieux par la Commission nationale de lutte contre l’enrichissement illicite (CNLCEI), qui a ouvert une enquête sur leur gestion, confie une source digne de foi.

Sous l’impulsion de son président, Nestor Mbou, l’institution entend passer du discours à l’épreuve des faits. Car derrière l’affichage généreux des enveloppes budgétaires, une question persiste, obstinée : où est passé l’argent et qu’a-t-il réellement produit ?

La démarche de la CNLCEI n’a rien d’anecdotique. Elle vise à vérifier la conformité de l’utilisation des fonds publics mis à disposition des provinces, à examiner les circuits de décaissement, l’exécution des projets annoncés et, le cas échéant, à identifier les manquements, irrégularités ou détournements susceptibles d’avoir jalonné ce vaste programme de financement territorial. En clair, il ne s’agit pas de présumer la faute, mais de refuser l’approximation.

Dans un contexte de Transition où la rhétorique de la rupture s’est imposée comme un mantra politique, la CNLCEI semble vouloir rappeler une évidence souvent négligée : l’argent public n’est pas une abstraction, mais une responsabilité. Pour Nestor Mbou, cette enquête s’inscrit dans une logique de continuité institutionnelle et de fermeté assumée. La Commission, n’entend donc ni céder à la complaisance ni se satisfaire de bilans déclaratifs. Elle veut des preuves, des pièces, des résultats. C’est le moins que l’on puisse dire.

Cette initiative traduit une volonté claire de restaurer la redevabilité dans la gestion des deniers publics, en particulier lorsqu’ils sont destinés à des populations dont les attentes, elles, ne sont jamais théoriques. Routes de proximité, infrastructures sociales, projets communautaires : autant de promesses qui ne peuvent rester à l’état de lignes budgétaires.

À l’heure où la Ve République revendique un nouveau rapport à l’État et à la morale publique, l’enquête de la CNLCEI agit comme un révélateur. Elle met à l’épreuve la sincérité des engagements et rappelle que la transparence ne se proclame pas : elle se vérifie. Les sept milliards par province, hier symbole d’ambition, deviennent aujourd’hui un test de crédibilité.

Reste à savoir si cet exercice de vérité ira jusqu’au bout de sa logique. Mais une chose est acquise : sous la direction de Nestor Mbou, la CNLCEI affiche sa détermination à faire des comptes un passage obligé, et non une option négociable. Dans un pays longtemps habitué aux zones d’ombre budgétaires, c’est déjà un changement de ton.

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