Brice Laccruche Alihanga : “J’ai dit non au prince qui voulait devenir roi”
Par Stive Roméo Makanga
Lundi 4 août, Brice Laccruche Alihanga, ancien directeur de cabinet d’Ali Bongo et désormais membre du Conseil Stratégique de l’Union des Bâtisseurs (UDB), a livré un témoignage explosif sur le plateau de TV5 Monde. Quatre ans après avoir disparu des radars (et des agendas officiels) l’ex-homme fort du Palais du Bord de mer revient de loin, au sens propre comme au figuré. Son récit d’une descente aux enfers carcérale prend, à l’écoute de ses mots, des allures de purge politique planifiée. Mais ce sont surtout trois phrases (prononcées avec calme, sans pathos, mais avec une densité de sens) qui jettent une lumière crue sur les dernières années du système Bongo-Valentin.
> « Nourreddin Bongo m’a dit : Mon grand-père était président, mon père est président, je serai président. Es-tu avec moi ou contre moi ? »
Cette phrase, presque shakespearienne, résume à elle seule l’atmosphère étouffante d’un pouvoir devenu héréditaire, verrouillé par un cercle restreint, et obsédé par sa propre perpétuation. Nourreddin Bongo Valentin, fils d’Ali Bongo, se rêvait manifestement en successeur naturel d’un régime qui, à défaut d’être légitime, voulait se croire éternel. La question posée à Laccruche, comme un ultimatum mafieux, ne laissait place à aucune nuance : allégeance ou exclusion.
> « J’ai dit non au prince qui voulait devenir roi. J’ai signé mon arrêt de mort. »
La suite de l’histoire est connue, ou presque. Arrestation brutale. Isolement extrême. Quatre années dans une cellule sans fenêtre, sans livre, sans promenade. Un oubli organisé, savamment entretenu, destiné à briser un homme qui avait osé dire non. Laccruche ne le dit pas, mais tout dans son regard et dans ses mots indique qu’il a survécu à une tentative de disparition politique pure et simple. Ce que certains appellent une purge, lui, parle d’exécution différée.
> « C’était une mise en œuvre organisée, planifiée, qui visait à m’assassiner. »
L’accusation est grave, directe, sans fioritures. Pas seulement contre le clan Bongo-Valentin, mais contre tout un système, qualifié par Laccruche de “mafia” et de “cartel”. À entendre l’ancien directeur de Cabinet, il ne s’agissait pas d’une simple mise à l’écart judiciaire, mais d’une entreprise systémique de destruction physique et morale. “La mort ou la prison”, disait-il : lui aura eu la prison, et le cancer en prime.
Ce témoignage, s’il dit vrai (et rien ne permet aujourd’hui de le discréditer totalement) doit interpeller. Non seulement parce qu’il éclaire les pratiques opaques du pouvoir déchu le 30 août 2023, mais parce qu’il rappelle une chose essentielle : les dictatures ne tombent pas du jour au lendemain. Elles pourrissent de l’intérieur, gangrenées par le mensonge, la peur et les ambitions d’héritiers trop pressés.
Laccruche, revenu de tout, semble aujourd’hui déterminé à parler. Non pas pour se venger, mais pour alerter. Et si l’homme a longtemps été l’un des rouages du système qu’il dénonce, il en est aussi (désormais) l’un des témoins les plus accablants.
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