[EDITORIAL] La résilience du leadership : l’UDB, Moundounga et les égos en rébellion
Par Stive Roméo Makanga
En politique, la victoire est rarement une récompense de la vertu : elle est le fruit d’un savant mélange de calculs, de sueur et, souvent, d’un brin de cynisme. La récente razzia électorale de l’Union Démocratique des Bâtisseurs (UDB) (107 sièges sur 145) n’échappe pas à la règle. Derrière cette démonstration de force, un homme : le Dr Séraphin Moundounga, vice-président de la République et stratège silencieux du parti. L’homme a pensé, organisé, galvanisé. Et, à première vue, triomphé.
Mais la politique a ceci de cruel qu’elle récompense l’effort pour mieux attiser les jalousies. À peine les urnes refermées, voilà que les vieilles rancunes et les ambitions mal digérées refont surface. Certains camarades de lutte, grisés par la victoire collective, se rêvent désormais en chefs d’orchestre. Ils oublient qu’on ne détruit jamais un parti plus sûrement qu’en cherchant à le diriger par la ruse ou l’intrigue.
Car ce qui a fait le succès de l’UDB, ce n’est pas un miracle. C’est une méthode. Celle d’un homme qui préfère le terrain aux salons, l’écoute aux slogans, et la patience aux effets de manche. Séraphin Moundounga n’a pas seulement coordonné une campagne ; il a façonné une dynamique. Il a su transformer une formation politique en un instrument de conquête, en prouvant que la rigueur stratégique vaut souvent mieux que les grandes envolées idéologiques.
Or, à Libreville comme ailleurs, rien n’est plus fragile qu’une victoire politique. Dans l’euphorie des chiffres, les vanités s’enhardissent. Quelques-uns, persuadés d’être les artisans oubliés du succès, s’érigent en victimes du système qu’ils servaient la veille. Le poison de la discorde s’infiltre alors dans les rangs, et l’unité, si chèrement bâtie, se fissure au rythme des ambitions contrariées.
C’est là que le leadership se distingue de la simple autorité. Être un chef, c’est imposer ; être un leader, c’est convaincre. Et le Dr Moundounga, qu’on l’admire ou qu’on le critique, a compris que gouverner un parti, c’est avant tout maintenir une cohésion fragile entre des egos surdimensionnés. À ceux qui l’accusent de centraliser ou de trop peser, il répond par l’efficacité : sans discipline, il n’y a ni victoire, ni avenir.
Mais la question demeure : l’UDB saura-t-elle résister à elle-même ? Les batailles électorales sont souvent plus faciles à gagner que les guerres intestines. Le parti des Bâtisseurs doit désormais prouver que son unité n’était pas qu’un vernis de campagne. Il lui faudra reconstruire une maison commune où chaque militant se sentira chez lui, sans pour autant s’imaginer propriétaire des lieux.
Dans ce tumulte, le Dr Moundounga incarne une forme rare de leadership : celle qui ne s’impose pas par la clameur, mais par la constance. Il sait que la politique n’est pas un concours d’amour-propre, mais un exercice de responsabilité. Et que les véritables bâtisseurs ne se reconnaissent pas à la taille de leurs discours, mais à la solidité de leurs œuvres.
La leçon est simple, presque banale, mais souvent oubliée : les partis meurent moins de la défaite que de la vanité de leurs vainqueurs. Si l’UDB veut durer, elle devra se souvenir que le ciment d’un édifice politique, ce n’est pas la gloire, mais la loyauté.



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