Par Stive Roméo Makanga
L’éboulement meurtrier du PK8 paraît, à quelques 10 mois du scrutin de 2023 comme un message subliminal du Gadlu. Seulement, Ali Bongo Ondimba l’interprète-t-il de cette façon ? Pas si sûr.
Au Gabon, la confiance dans les politiques recule. Un fait très bien illustré par le niveau du taux d’abstention observé en période électorale, les dernières législatives partielles incluses, et dont le Centre gabonais des élections (CGE) n’ose pas évoquer, tant il pourrait décrédibiliser les élus.
Les populations ont définitivement compris qu’elles ne servent que d’arguments. Prises pour des “bêtes sauvages”, elles ne sont destinées, ainsi que le décrit avec talent Ahmadou Kourouma dans son œuvre “En attendant le vote des bêtes sauvages”, qu’à remplir un objectif global.
Faut-il croire aux promesses de campagne? Autant s’appuyer sur des sables mouvants. Et dans le cas d’Ali Bongo Ondimba, tout le monde l’a bien compris. 13 ans sans plan cohérent ni stratégie de développement traduit avec rigueur: ça paie “cash”.
Chacun observe impuissant, avec indignation et regret, le lent et agonique effondrement du pays. En promettant monts et merveilles à un peuple en quête de réel développement et de mieux être, Ali Bongo Ondimba a couru un risque considérable : celui de la concrétisation à tout prix.
Il aurait tôt fait de savoir que la politique des bonnes intentions ne sert à rien, et que ses “coups de com” déboucheraient sur “la preuve par les actes”. Qu’en est-il aujourd’hui, à l’heure du bilan ? Échec “cash”.
Le président de la République a continuellement dansé au tango, passant du “Plan Stratégique Gabon Émergent” (PSGE) au “Plan d’accélération et de la transformation” (PAT). Une bifurcation si soudaine, qui pouvait laisser croire que les consignes des cabinets qui les ont élaborées avaient besoin de quelques retouches. Mais, chacun a très vite compris qu’elles (consignes) n’avaient plutôt pas été exécutées avec rigueur et jugement.
Ali Bongo Ondimba peut d’ores et déjà être considéré comme le président du surendettement et de l’immobilisme, qui n’aura pas réussi à “sécuriser” ses compatriotes. Cette réputation ne serait pas usurpée.
Ses choix et méthodes d’investissement n’ont eu de cesse d’étonner les économistes émérites, autant qu’ils ont exaspéré les Gabonais.
Avec une population de seulement 2 millions d’habitants sur toute l’étendue du territoire national, moins qu’Accra, la capitale Ghanéenne, ou Douala, ville du littoral du Cameroun, qui compte près de 4 millions d’habitants, le président gabonais a dynamité tous les espoirs de faire du Gabon un pays dont on jalouse la qualité de vie.
Ce sont précisément ces observations que lui font savoir la société civile et la classe politique de l’opposition, celle qui ne s’acoquine pas du jeu de dupes opposition-majorité. On ne peut avoir autant d’armes à la main et échouer.
Si les détournements de fonds n’avaient pas constitué le fait marquant des deux septennats d’Ali Bongo Ondimba, si la réduction du train de vie de l’État (en commençant par la réduction de l’équipe gouvernementale et les salaires), et si l’amélioration des conditions de vie des populations avaient réellement été la priorité du fils d’Omar Bongo Ondimba, il est presque certain que le signe indien aurait été conjuré. Sous développement, misère et pauvreté ne seraient plus que de l’histoire ancienne.
Mais faute de cela, Ali Bongo Ondimba pourrait voire la vague d’indignation née depuis l’éboulement meurtrier du PK8 s’étendre jusqu’à la période électorale de 2023. Ceci constitue la goutte d’eau qui fait déborder le vase.
La promesse non tenue des 5000 logements annuels continue de retentir. Les objections et autres protestations, qui n’ont de cesse de s’élever de ci, de là, montrent combien ceci douche les espoirs du bord politique d’Ali Bongo Ondimba, lequel jubilait déjà après le “succès” des législatives partielles, à l’idée de rempiler au palais Rénovation, au terme du scrutin présidentiel à venir.
L’échec “cash”, qui était jusqu’ici hypothétique, se confirme de plus en plus. Et le drame du PK8 semble être le Rubicon qu’il ne fallait surtout pas franchir. C’est fait.