Affaire HPO : Eddy Minang face au défi de restaurer la crédibilité de la justice gabonaise
Par Joseph Moundruma
L’affaire Hervé Patrick Opiangah (HPO), qui a défrayé la chronique judiciaire et politique au Gabon, connaît un nouveau rebondissement. Après des mois de procédures controversées, le dossier a finalement été transféré à la chambre d’accusation du Parquet de la République, sous la responsabilité du Procureur général Eddy Minang. Une étape cruciale qui place ce dernier face à un choix lourd de conséquences : honorer la justice gabonaise en rendant une décision équitable, ou succomber aux pressions et entacher, comme son prédécesseur Bruno Obiang Mve, l’image d’une institution déjà fragilisée. L’affaire HPO, qualifiée par certains observateurs de « machination judiciaire », repose sur des bases pour le moins fragiles. En effet, l’absence de victime, de plainte préalable et de preuves tangibles engendre des questions sur la légitimité même de la procédure. Pourtant, malgré ces lacunes manifestes, le dossier a été maintenu, tout en alimentant les suspicions d’une instrumentalisation politique. Le déclenchement de l’action publique, sur la base d’une plainte supposée, a été suivi d’une série d’irrégularités. Ainsi, la garde à vue prolongée de cinq jours pour la fille d’Hervé Patrick Opiangah, la supposée victime, Elisabeth Opiangah Mengue, les perquisitions illégales et la mise sous scellés de sa holding employant plus de 5 000 Gabonais ont suscité l’indignation.
Ces actions ont renforcé l’idée d’un complot orchestré par des « mains noires », selon les termes des défenseurs d’Opiangah. Au cœur de cette affaire, le Procureur de la République Bruno Obiang Mve a joué un rôle central. En s’exprimant à la télévision nationale pour justifier les actions engagées contre Opiangah, il a été accusé de diffuser des informations mensongères et de participer à une campagne de diffamation. Son implication a jeté une ombre sur l’indépendance de la justice gabonaise, déjà mise à mal dans un contexte de transition politique. Les avocats de la défense n’ont pas manqué de relever les incohérences du dossier, notamment la date de la plainte de Madame Lucie Biloghe, présentée comme le déclencheur de l’action publique.
Selon l’UDIS, cette plainte a été enregistrée a posteriori, le 25 novembre 2024, et non le 14 novembre comme l’avait affirmé Bruno Obiang Mve. Cette révélation confirmerait que les autorités judiciaires ont agi en toute illégalité pendant plusieurs jours, sans base légale. Aujourd’hui, c’est au Procureur général Eddy Minang qu’il revient de trancher. Sa décision sera scrutée à la loupe, tant par les partisans d’Opiangah que par ceux qui voient en cette affaire un test pour la crédibilité de la justice gabonaise. Les éléments du dossier plaident en faveur d’un non-lieu : absence de caractérisation de l’infraction, absence de victime, et preuves insuffisantes.
Cependant, dans un contexte où les pressions politiques et les jeux d’influence semblent omniprésents, la tâche s’annonce complexe. Eddy Minang se trouve à un carrefour décisif. S’il choisit la voie de l’intégrité, il pourrait redonner un semblant de crédibilité à une institution judiciaire en quête de légitimité. Il faut avouer que l’affaire HPO dépasse largement le cadre judiciaire. Elle interroge la capacité de la justice gabonaise à fonctionner de manière indépendante et impartiale, loin des interférences politiques. Les Gabonais, qui suivent de près les développements de cette affaire, attendent une décision juste et équitable. Pour Eddy Minang, l’enjeu est de taille : dire le droit sans compromission, ou risquer de souiller davantage une institution déjà fragilisée. Dans un pays en pleine transition, où les attentes en matière de réformes judiciaires sont immenses, son choix pourrait marquer un tournant. En attendant, une question demeure : la justice gabonaise saura-t-elle se relever de ses travers, ou continuera-t-elle à sombrer dans les méandres du non-droit ? La réponse, désormais, appartient à Eddy Minang.
À suivre…



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