Par Stive Roméo Makanga
Le climat au sein de l’Agence Nationale des Infrastructures Numériques et des Fréquences (ANINF) est aujourd’hui marqué par des tensions exacerbées et des pratiques managériales controversées. Au cœur de la tourmente, le directeur général, Alberto Wenceslas Mounguengui Moudoki, dont les décisions et les agissements suscitent indignation et interrogations quant à la transparence et à la régularité de la gestion de cette structure stratégique.
L’un des principaux griefs concerne les avantages financiers personnels que s’est octroyés le directeur général. S’appuyant prétendument sur une autorisation du président de la Transition, il percevait un montant exorbitant de 50 480 000 F CFA par mois au titre de fonds de cabinet personnels, en sus de son salaire. À cela s’ajoute un forfait mission de 10 000 000 F CFA par déplacement, qu’il encaissait à raison de trois à quatre missions mensuelles, quelle que soit la durée ou la destination. Ces avantages cumulés faisaient grimper son traitement mensuel hors salaire à une somme estimée entre 70 et 80 millions de F CFA, une situation que le Conseil d’administration a qualifiée d’insoutenable.
Lors de sa séance du 4 octobre 2024, le Conseil d’administration a décidé de ramener les fonds de cabinet personnel à 5 000 000 F CFA et de redistribuer le reliquat au fonctionnement des services et au cabinet du Président du Conseil. Cependant, le directeur général aurait refusé de s’y conformer, alimentant un conflit ouvert avec le Directeur Financier et des Moyens Généraux.
Ce serait au point que les tensions entre le directeur général et le Directeur Financier et des Moyens Généraux ont pris une tournure inquiétante, avec des pratiques qui relèvent d’une gestion autoritaire et abusive. Selon une source digne de foi et très proche du dossier, des menaces voilées ont été proférées, évoquant une arme à feu chargée en plein comité de direction. L’autorité du Directeur Financier a été contournée par la délégation abusive de ses prérogatives à des collaborateurs. En son absence, des biens personnels, dont deux coffres-forts, ont été saccagés. Enfin, le Directeur Financier a été suspendu de manière arbitraire, sans respect des procédures disciplinaires prévues par la loi N°1/2005 du 4 février 2005.
Ces agissements rappellent des précédents similaires impliquant d’autres cadres, notamment le Directeur de la Communication, victime d’un isolement professionnel, suivi d’une suspension et d’un limogeage.
Le lundi 18 novembre 2024, trois paiements d’un montant global de 121 954 638 F CFA ont été effectués du compte de l’ANINF en faveur de trois structures : 54 568 758 F CFA au profit du CENAREST, 48 480 000 F CFA pour Act Africa Gabon, et 18 905 880 F CFA pour l’ONG Femme. Ces transactions n’ont pas été engagées par les services de la Direction Financière et des Moyens Généraux. Ce qui soulève des doutes quant à leur régularité. La vérification des contrats, des preuves de service et des documents justificatifs s’impose donc pour dissiper les soupçons de malversation.
Les mesures unilatérales prises par Alberto Wenceslas Mounguengui Moudoki semblent outrepasser ses prérogatives, notamment en matière de suspension et de nomination, des compétences exclusives du président de la République. Ces pratiques laissent transparaître un management marqué par un manque de respect des procédures établies, tout en alimentant une crise de gouvernance au sein de l’ANINF.
Face à ces dérives, il devient urgent d’instaurer une gouvernance plus transparente et conforme aux textes en vigueur. Un audit approfondi s’impose pour évaluer la gestion des fonds publics et restaurer un climat de sérénité au sein de l’agence. Le cas de l’ANINF illustre une fois de plus les défis auxquels l’administration gabonaise fait face en matière de transparence et de redevabilité.