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Protection de l’enfance : quand Ntoum transforme une célébration en véritable leçon civique

Par Stive Roméo Makanga

Il est devenu convenu, presque rituel, de célébrer chaque 20 novembre la Journée internationale des droits de l’enfant. Un événement mondial, proclamé en 1989, que l’on commémore trop souvent à coups de discours aussi creux que les promesses de bonne gouvernance. À Ntoum, cette année, l’exercice a heureusement échappé à la liturgie des vœux pieux pour se transformer en une véritable leçon de droit, de civisme et (phénomène rare) de responsabilité.

À l’initiative de l’honorable députée du 1er arrondissement, Camélia Ntoutoume Leclercq, la célébration s’est déroulée ce samedi 22 novembre 2025, en rassemblant enfants, encadreurs, parents, magistrats et acteurs institutionnels de la protection de l’enfance. Consciente que proclamer des droits ne suffit jamais à les faire respecter, l’élue a choisi d’assumer pleinement la vocation première du législateur : éclairer, rappeler, protéger. « Nous avons tenu à ne pas être en marge de cette célébration, dans la Commune de Ntoum, au 1er arrondissement. C’est la raison pour laquelle nous l’avons célébrée avec les enfants », a-t-elle déclaré, en rappelant d’une certaine manière que « le domaine de prédilection de tout député, c’est le droit ». Et le droit, pour être utile, doit être compris, surtout par ceux qu’il est censé protéger.

Sous le thème « Ma journée, Mes droits », la rencontre a donc pris la forme d’une immersion pédagogique articulée autour d’ateliers, de sketchs et de discussions animées par un juriste. Les enfants ont exploré les principaux droits garantis par la Convention internationale des droits de l’enfant (que le Gabon a ratifiée) parmi lesquels le droit à la santé, à l’alimentation, à l’éducation, à l’identité ou encore la protection contre les violences et les abus.

Mais la journée n’a pas uniquement servi à rappeler des principes abstraits. Elle a surtout permis de revisiter les fondations juridiques nationales, souvent méconnues. Le Gabon dispose en effet d’un instrument essentiel : le Code de l’enfant. Ce texte identifie clairement les acteurs de la protection de l’enfance (du juge des enfants aux travailleurs sociaux) et balise les décisions judiciaires qui doivent être prises en cas d’abus, de négligence ou de traite. Lorsque des enfants sont victimes, ils sont immédiatement placés en structures d’accueil, à l’abri, le temps que justice soit rendue. Et lorsque certains, malheureusement, se retrouvent en porte-à-faux avec la loi, c’est encore le juge des enfants qui statue, dans un cadre strictement encadré.

Invité spécial, le juge pour enfants, Simost Ntoutoume Evrard, a rappelé ce que beaucoup préfèrent ignorer : les droits ne fonctionnent jamais sans devoirs. « Il s’agissait pour nous de rappeler aux parents et aux enfants quels étaient leurs droits et leurs devoirs », a-t-il souligné, avant d’ajouter : « Il s’agissait également de les édifier sur la nécessité d’avoir accès à la santé, à l’Éducation, à une alimentation de qualité, mais aussi de dire aux parents quelles sanctions ils encouraient en cas de manquements à leurs obligations ». L’avertissement (limpide) a semblé faire son effet dans l’assistance, tant les dérives parentales sont souvent maquillées sous les prétextes les plus commodes.

Derrière les ateliers et les jeux, une idée forte s’est imposée : la protection de l’enfant ne peut être efficace que si chacun (État, magistrature, parents, enseignants, communauté) assume sa part. Et si les enfants eux-mêmes, informés, deviennent des relais de vigilance dans leurs écoles et leurs quartiers.

Ce mélange subtil de pédagogie, de sensibilisation et de lucidité juridique a permis, pour une fois, de « joindre l’utile à l’agréable », selon l’expression reprise par plusieurs participants. À Ntoum, la Journée internationale des droits de l’enfant n’a pas été une célébration de plus, mais un rappel salutaire : les droits ne se proclament pas, ils s’apprennent, se protègent et s’exercent.

Et parfois (comme ce 22 novembre) ils se célèbrent intelligemment.

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