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Quand Ian Ngoulou et Noureddine Bongo orchestraient les purges: Laccruche Alihanga fait des révélations sur TV5 Monde

Par Stive Roméo Makanga

Il est des silences qui pèsent plus lourd que des discours. Celui de Brice Laccruche Alihanga, ex-directeur de cabinet d’Ali Bongo Ondimba, aura duré près de quatre ans. Ce 4 août 2025, sur le plateau policé de TV5Monde, il a parlé. Mieux : il a vidé son sac. Et ce qu’il en a sorti ressemble moins à une simple plaidoirie qu’à une radiographie brutale du système Bongo – version terminale.

Face caméra, Laccruche ne s’est pas contenté de dénoncer les conditions inhumaines de sa détention – cellule exiguë, isolement, perte de poids dramatique, diagnostic d’un cancer du côlon. Il a pointé du doigt ceux qu’il accuse d’avoir orchestré sa chute avec la précision d’un scalpel politique : Nourredine Bongo Valentin, le fils de l’ancien président, et son lieutenant, Ian Ghislain Ngoulou, présenté comme l’architecte zélé d’une mise au ban qui, si l’on en croit le principal intéressé, n’avait rien de juridique mais tout de l’exécution politique.

> « Ce n’était pas une détention, c’était une exécution lente », a-t-il lâché. Le ton est donné.

Ce que décrit Laccruche, c’est un appareil d’État privatisé, mis au service d’un clan plus soucieux de succession que de justice. L’arrestation ? Un prétexte. La détention ? Un avertissement. La justice ? Une simple variable d’ajustement. Derrière cette mécanique froide, un objectif : neutraliser un homme devenu trop influent pour un pouvoir en recomposition.

À l’entendre, le scénario était écrit d’avance. Une scène, surtout, glace le sang : celle où Ian Ghislain Ngoulou lui aurait rendu visite en prison en 2023 pour lui signifier – en toute décontraction – qu’il vivait désormais chez lui, portait ses costumes, et que la sentence était déjà prononcée : 25 à 30 ans de prison. Le message est clair. La méthode, elle, porte un nom : prédation politique.

Car c’est bien d’une purge qu’il s’agirait. Pas de celle, spectaculaire, des révolutions latines ou des procès soviétiques. Non : une épuration à la gabonaise. Silencieuse, opaque, presque élégante dans sa froideur bureaucratique. Elle se joue dans les couloirs, pas dans les tribunaux. Elle passe par les réseaux plus que par la loi. Et elle désigne ses victimes non selon le Code pénal, mais selon la menace qu’elles représentent pour l’ordre dynastique.

Laccruche, jadis figure montante du pouvoir, en a fait les frais. D’autres y verront un symbole : celui d’un système qui, même en fin de règne, n’a jamais cessé de fonctionner selon les mêmes ressorts – l’allégeance, la crainte, l’élimination ciblée.

Dans un Gabon qui tente de se redéfinir après l’éviction des Bongo, cette confession fait l’effet d’un pavé dans la lagune. Non pas pour son aspect sensationnaliste – les dictatures africaines ne manquent jamais de drames humains –, mais pour ce qu’elle révèle d’un État façonné non par les institutions, mais par les intérêts d’un clan.

 

 

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