Gabon/Hydrocarbures : Pourquoi Koreg monopolise-t-il les parts de marché ?
Par Stive Roméo Makanga
En Avril 2024, le Gabon a franchi une étape inédite dans son secteur pétrolier avec la signature d’un Contrat d’exploitation et de partage de production (CEPP) entre l’État, représenté par le ministère du Pétrole, et la société autochtone Komo Ressources Group (Koreg). Ce contrat porte sur le champ pétrolier « autour n°G5-142 », situé dans la province de la Ngounié, couvrant une superficie de 45,79 km².
Selon les termes de cette convention, Koreg, propriété d’un Gabonais d’origine chinoise, s’engage à investir au moins 3 milliards de francs CFA dans ce projet. Les travaux incluent l’installation d’équipements de production, la mise en service des puits DIAU-3H et DIAU-1, ainsi que le raccordement des pipelines d’exploitation et des points de comptage.
Sur le plan économique, l’accord prévoit une redevance minière proportionnelle de 8 % pour le pétrole brut et de 6 % pour le gaz naturel, un taux de récupération des coûts à hauteur de 70 %, et une première tranche de partage de production de 45 % pour l’État contre 55 % pour l’opérateur. En retour, l’État gabonais devrait percevoir 1,2 milliard de francs CFA.
Bien que cet investissement semble prometteur, il suscite de vives interrogations au sein de la communauté économique et des PME gabonaises. Koreg, qui avait déjà obtenu un marché pour un premier bloc pétrolier en avril 2024, est, selon des sources bien introduites à la Direction Générale des Hydrocarbures, sur le point d’acquérir de nouveaux blocs au détriment d’autres PME locales. Ces entreprises, pourtant en conformité avec les critères requis, se voient écartées. Toute chose qui alimente les soupçons de favoritisme et de monopole.
Ce favoritisme apparent rappelle tristement les cas de Souleyman Liban et de Meixan Accrombessi, deux gabonais d’adoption ayant bénéficié de largesses de l’État avant de quitter le pays, en laissant derrière eux un bilan mitigé et des opportunités ratées pour d’autres acteurs locaux.
Il faut dire que cette situation interpelle sur le respect des engagements pris par les autorités gabonaises pour promouvoir le développement des PME locales. Alors que les discours officiels insistent sur la nécessité de renforcer le tissu économique national, la réalité semble démontrer un autre visage.
Pourquoi favoriser une seule entreprise, même dirigée par un compatriote, tout en marginalisant des PME locales, qui, elles aussi, aspirent à contribuer au développement du secteur pétrolier ? Ce manque d’équité pourrait à terme compromettre les ambitions affichées de diversifier et de dynamiser l’économie gabonaise.
Face à cette réalité préoccupante, il est urgent que les plus hautes autorités se penchent sur cette question. La gestion équitable des parts de marché dans le secteur stratégique des hydrocarbures doit être une priorité, pour garantir non seulement une concurrence saine, mais aussi une redistribution équitable des richesses nationales.
La nomination de Koreg comme acteur majeur, bien qu’un exploit en soi pour une PME gabonaise, ne doit pas se faire au détriment des autres. Si la promotion des talents locaux est essentielle, elle doit également s’inscrire dans une logique d’inclusion et de justice. Les exemples passés de favoritisme doivent servir de leçons pour éviter de reproduire les mêmes erreurs.
Alors que le Gabon cherche à rendre son bassin sédimentaire attractif et compétitif, il serait dommageable de saper cette ambition par des pratiques qui divisent au lieu d’unir. La création d’un environnement économique transparent et équilibré est indispensable pour faire du Gabon une référence en matière de gestion des ressources naturelles, au bénéfice de tous ses citoyens.
Les PME gabonaises, au cœur de cette ambition, doivent être soutenues et non reléguées à un rôle secondaire. Les autorités sont interpellées : à elles d’agir pour redresser la situation et offrir à toutes les entreprises locales une chance équitable de prospérer.
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