Par Pauline Ntsame
Dans un propos rapporté par nos confrères de Dépêches 241, Jean Robert Menié, le président du Syndicat libre des transporteurs Gabonais (SYLTEG) prévenait d’une “journée sans taxis”, aux fins de protester contre la décision du gouvernement, laquelle acte un déguerpissement général au lieu dit de la Gare routière.
Un pétard mouillé, si l’on s’en tient à l’activité de ce 27 décembre, dans ce secteur à la fois stratégique et essentiel. Le désaveu des transporteurs est formel: Jean Robert Menié et ses orientations prises à l’emporte pièce peuvent toujours courir.
Un mot d’ordre non suivi, et qui, pour l’emblématique protestataire et défenseur des droits des transporteurs Gabonais, sonne comme un échec cuisant, en plus de balayer son niveau d’influence auprès des plus hautes autorités de la République.
Mais la rétractation des chauffeurs de taxis semble, pour beaucoup, apparaître comme un fait évident.
“Le secteur des transports est largement tenu par nos frères expatriés. Ils sont très majoritaires. Si vous les Gabonais vous boycottez, les étrangers continueront de travailler. Appeler au boycott n’est pas réaliste et monsieur Menié le sait bien. Qui va vous écouter ? En tout cas pas un étranger”, témoigne Hugor, agent de l’État et transporteur à temps partiel.
“Lorsque je prends mon véhicule de 6h à 13h, j’ai entre 30 et 40.000 de recette. Je me repose à cette heure là et je reprends à 16h pour finir vers 22h. Avec ça seulement, je peux atteindre 60 à 70.000 francs CFA par jour. Vous imaginez celui qui commence depuis 5h du matin et arrête à minuit? Je vous rappelle que le prix du taxi au Gabon est bien plus élevé que dans beaucoup de pays d’Afrique. En une seule journée de travail au Gabon, vous avez payé au moins deux à trois mois de loyer au Cameroun, au Bénin, au Togo et j’en passe”, ajoute-t-il.
Un fait réel qui aurait pesé chez les transporteurs. “Même si on le voulait, on serait quand-même obligé de travailler. Bloquer son taxi une seule journée est une perte énorme. Et nous avons des charges. Nous comprenons Menié, mais la réalité c’est que personne aujourd’hui n’est prêt à immobiliser son véhicule. Et puis il faut savoir que nous avons déjà beaucoup perdu pendant les deux ans de COVID”, explique Martial, transporteur Gabonais.
“l’État a toujours mis la charrue avant les bœufs. Avant d’interdire le site de la Gare routière, où est celui qu’ils ont construit? Il n’y en a aucun. La revendication de nous autres transporteurs est légitime. Mais si nous garons nos véhicules, les étrangers eux continueront de bosser. Le secteur est libéralisé. Beaucoup trop libéralisé. Impossible de respecter les orientations du président Menié”, explique-t-il.
C’est donc foutu. Jean Robert Menié aura beau crier, mais les réalités de terrain l’emporteront toujours.