Affaire Michel Ikamba : Plus de 32 millions de francs CFA de loyer impayé par le Consulat du Bénin à Libreville
Par Stive Roméo Makanga
Dans l’arène kafkaïenne des affaires diplomatiques, le dossier de Michel Ikamba s’impose comme un révélateur des dysfonctionnements abyssaux qui gangrènent nos institutions. Sept ans, c’est bien plus qu’un simple différend locatif : c’est un témoignage édifiant de la manière dont un citoyen gabonais peut être broyé par l’inertie administrative et l’irresponsabilité collective.
Le récit de Michel Ikamba commence en 2017, dans ce qui aurait dû être une simple relation contractuelle. Le propriétaire, fort des dispositions légales, signe un bail avec le Consulat du Bénin à Libreville. Quelques mois plus tard, des loyers impayés s’accumulent. Rien de plus banal dans un pays où les contrats, même officiels, se heurtent à des violations récurrentes. Mais le véritable drame se joue dans l’après : la villa scellée, les arriérés non réglés (32,4 millions de francs CFA de loyer impayé par le Consulat du Bénin à Libreville) et, surtout, l’indifférence patente des autorités gabonaises.
Comment expliquer qu’un problème aussi clair – un propriétaire lésé, des dispositions légales ignorées – puisse perdurer pendant sept longues années ? La diplomatie aurait-elle carte blanche pour bafouer le droit des citoyens locaux ? Le silence assourdissant du ministère des Affaires étrangères ne fait qu’amplifier cette impression.
Il faut reconnaître que l’affaire Michel Ikamba transcende le simple cadre du litige immobilier. Elle incarne le mal plus profond d’un État qui semble incapable de répondre à ses propres citoyens. Qu’il s’agisse de correspondances restées lettre morte ou d’interventions de haut niveau – comme celle du Haut Représentant du Chef de l’État, Gervais Oniane – tout converge vers une conclusion troublante : l’État gabonais s’avère inapte à protéger les droits de ses citoyens face à des institutions étrangères et ce, même en période de transition alors que le Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) avait dit « restaurer la dignité des gabonais ».

Cela pose une question fondamentale : si le Gabon, à travers ses représentants, ne peut garantir la justice pour un citoyen aussi manifestement lésé, quel espoir reste-t-il pour le reste de la population ? L’injustice dans l’affaire Michel Ikamba devient alors le miroir des maux structurels d’un État qui peine à réconcilier principes et actions.
Pour Michel Ikamba, la transition incarnée par Brice Clotaire Oligui Nguema représente une ultime bouée de sauvetage. L’homme espère que la restauration des institutions, souvent brandie comme une promesse phare du régime, trouvera ici l’occasion de se matérialiser. Pourtant, une question s’impose : pourquoi faut-il toujours espérer un coup de théâtre présidentiel pour résoudre ce qui relève du fonctionnement normal des institutions ?

Ce dossier met en exergue l’urgence de réformes profondes, non seulement dans la gestion des contentieux diplomatiques, mais aussi dans la capacité des administrations à fonctionner de manière autonome et efficace. Laisser un citoyen se battre pendant sept ans pour un droit aussi fondamental, c’est miner la confiance déjà vacillante dans nos institutions.
Au-delà des arriérés de loyer et de la villa dégradée, Michel Ikamba pose une question existentielle : qui pour restaurer la dignité des Gabonais lésés ? C’est la véritable tragédie de cette affaire : bien plus qu’une question d’argent ou de propriété, c’est une blessure infligée à l’idée même de citoyenneté. Dans un pays en quête de renouveau, ce cri mérite une réponse – pas seulement pour Michel Ikamba, mais pour tous ceux qui, un jour, pourraient se retrouver dans sa situation. « Le Coup de libération m’a donné l’espoir que ce contentieux devrait enfin trouver un ouf de soulagement. Mais je ne cesse de m’interroger qui pour restaurer la dignité des Gabonais lésés ? Qui pour rendre justice à ceux qui ont été injustement blessés dans leur amour propre ? Qui pour faire bouger les lignes ? Qui est ce qui peut expliquer que 18 mois après, le ministère des Affaires étrangères ne puisse pas trouver de solutions à un compatriote en détresse ? Qui pour répondre ? «
Loin d’être un simple fait divers, cette affaire est un test pour la transition en cours. Le traitement de ce dossier, et de tant d’autres semblables, déterminera si le Gabon peut réellement se tourner vers un avenir où la justice et la dignité ne sont plus des promesses, mais des réalités tangibles.
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